Individualisation des frais de chauffage, vers une mesure injuste et mal engagée

Publié le par clcv-loire-atlantique.over-blog.com

Si nous sommes favorables, par principe, aux mesures favorisant le développement durable et les économies d’énergie, encore faut-il que ces dispositions soient adaptées aux objectifs recherchés. C’est toute la question de l’obligation de procéder, d’ici le 31 mars 2017, à l’individualisation des frais de chauffage dans tous les immeubles dotés d’un chauffage collectif (copropriétés, HLM).

La principale problématique concerne la réelle efficacité de ces dispositifs. Or, les chiffres sont très variables en ce domaine et révèlent toute la complexité de la matière. Si d’aucuns tablent sur une économie de l’ordre de 20 %, d’autres sont plus modérés et font des estimations aux alentours de 15 % ou déterminent une fourchette allant de 7 % à 20 %. Même les simulations de l’ADEME, pourtant favorable à la mesure, ne montrent pas une économie si importante que cela.

Mais sans entrer dans le débat de l’efficacité ou non de ces dispositifs, la façon dont les pouvoirs publics entendent mettre en place cette obligation de pose est aberrante et relève d’une méconnaissance totale du terrain et ce pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, le délai pour la réalisation de ces travaux est extrêmement court et un grand nombre d’immeubles ne seront pas dotés de répartiteurs d’ici le 31 mars 2017. Alors même que les copropriétés sont en train de réaliser des audits énergétiques afin de prioriser les travaux les plus importants et efficaces (isolation de la façade, par exemple), on impose des travaux préalables dont l’impact sur la performance énergétique de l’immeuble sera bien moindre. Poser un compteur de chaleur n’a jamais permis d’améliorer le confort d’une passoire énergétique et on ne saurait considérer une telle opération comme prioritaire.

Ensuite, la sanction financière de 1 500 € par logement non doté de répartiteur est scandaleuse et inadmissible. Elle pénalise le justiciable tel un délinquant en lui infligeant une amende qui correspond, à titre comparatif, à un excès de vitesse supérieur à 50 km/h par rapport à la limite autorisée. A priori, les pouvoirs publics semblent trouver ces situations comparables…

Par ailleurs, il est envisagé de supprimer la notion de transfert de calories ou de situation thermiquement défavorable, alors que ces situations sont actuellement prises en compte (avec un taux de 30 % réparti équitablement entre les occupants). Autrement dit, les logements exposés plein Sud ou plein Nord, entourés d’autres appartements (et donc chauffés en partie par ces derniers) ou situés au dernier étage en pignon seront traités de la même façon. Une telle mesure est injuste et va pénaliser les occupants de logements « mal situés » dont la facture pourrait augmenter de 44 % !

Enfin, se pose la question du coût de cette obligation. Les frais de pose et de location des compteurs (jusqu’à 50 €, voire plus dans certains cas) impacteront le montant réel des économies réalisées. A ces frais se rajoutent, d’une part, les augmentations des honoraires des syndics engendrées par la gestion de compteurs supplémentaires dans la copropriété, montant qu’il est toutefois difficile d’estimer et, d’autre part, le risque de voir un effet d’aubaine des professionnels qui en profiteraient pour augmenter leurs tarifs.

Si la CLCV ne s’oppose pas par principe à la mise en place de mécanisme permettant de limiter les dépenses énergétiques, la façon dont la pose de répartiteurs de chaleur est imposée est totalement contre-productive et source d’inégalités entre les occupants.

 

C’est pourquoi la CLCV demande :

- à ce que l’obligation de pose soit reportée dans le temps afin de prendre en compte la réalisation des audits énergétiques et le vote des plans pluriannuels de travaux ;

- que cette obligation ne concerne que les immeubles ne respectant pas un certain de seuil de performance énergétique afin de les inciter à réaliser des travaux d'économie d'énergie ;

- que des coefficients soient déterminés et fixés afin de prendre en compte les logements qui sont en situation thermiquement défavorables (pignon, exposition Nord…) ;

- que des moyens de contrainte autre que la pénalité financière soient envisagés.

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